Phnom Penh, débordante et éprouvante

Depuis le sud du Cambodge, ce sont les abords de Phnom Penh que nous découvrons en premier : leurs usines en enfilade, leurs ouvriers en blouse entassés à l’arrière d’une camionnette après le boulot, et une agitation palpable partout le long des routes.

Cette effervescence bat son plein quand nous entrons dans le centre de Phnom Penh, une ville en pleine mutation, où les grues encombrent le ciel et où partout s’élèvent de grands immeubles. Nous sentons une ville pressée d’aller de l’avant.

Ici plus qu’ailleurs, traverser la rue est une véritable gageure. La circulation est dense et semble bien anarchique à nos yeux d’Occidentaux disciplinés. Les feux de signalisation ne sont pas toujours respectés, les stations-service au coin des rues servent de raccourcis et les passages piétons ne sont dessinés qu’à titre indicatif…

Phnom Penh concentre les lieux de témoignage des crimes perpétrés par les Khmers rouges pour qui souhaite mieux connaître (est-il seulement possible de la comprendre ?) la dictature sanguinaire menée par l’organisation après son arrivée au pouvoir en 1975. Nous y sommes allés à notre arrivée car il était important pour nous de savoir ce que le Cambodge avait traversé ces quarante dernières années.

Le musée du génocide, établi sur le site de la prison S-21, sera notre première approche du drame cambodgien. La visite en est extrêmement pénible. Ancien lycée reconverti en centre de torture, l’endroit est glaçant. Le petit jardin ensoleillé et les chants d’oiseaux dans les arbres ne parviendront pas à lui rendre sa chaleur. Loin des rires des enfants jouant dans la cour, ce sont les cris de douleur qui résonnent entre ces murs. Les barbelés couvrent les étages, les fers sont fixés au sol, les dérisoires cellules encore maculées de sang. Toute personne qui arrivait ici était un coupable obligé. Plusieurs fois, il nous faut nous asseoir à l’extérieur de ces murs funestes pour pouvoir écouter le récit des atrocités qui y ont été commises pour de fausses confessions.

Nous n’avions guère envie d’ajouter au choc de cette visite la découverte des Killing fields, où tous ceux qui avaient signé des aveux étaient ensuite conduits et abattus en pleine nuit, au son de chants révolutionnaires pour ne pas éveiller les soupçons. C’est au hasard d’une rencontre avec un chauffeur de tuk-tuk sympathique et convaincant que nous acceptons de nous y rendre le lendemain.

Le site est à environ une demie-heure de route du centre-ville. Comme nous le redoutions, en faire le tour est particulièrement éprouvant. Des morceaux d’os humains et des lambeaux de vêtements remontent à la surface de la terre comme si toutes les personnes assassinées en ces lieux ne devaient jamais trouver de repos et devaient pour toujours hanter ce champ où les pires exactions ont été commises au nom d’une triste utopie qui a ravagé le pays. Une utopie qui se prétendait égalitaire et qui n’avait rien d’humain. Nous sommes particulièrement touchés par le témoignage d’un rescapé qui a survécu en s’accrochant à un rêve de sa mère qui le disait invulnérable, tout comme devant cette dame agenouillée en prière au pied de l’arbre contre lequel les enfants étaient battus à mort.

À la fin de la visite, un temple élevé en hommage aux victimes expose leurs crânes sur 17 étages (en référence au 17 avril 1975, date à laquelle les Khmers rouges sont entrés dans la ville). Les crânes sont classés par âge, sexe ou selon l’outil de mort utilisé… Une musique religieuse retentit dans le temple en leur mémoire. Impossible d’en ressortir indemne.

Nous choisissons de donner une note plus colorée à la suite de notre journée en faisant le tour des marchés. Amélie les adore et Phnom Penh en compte beaucoup (au grand regret de Julien !). Nous commençons avec le marché russe, au sud-ouest de la ville, tout près de S-21, qui doit son nom à l’afflux de voyageurs russes dans les années 80. Il a d’ailleurs gardé sa vocation de grand magasin pour les touristes. Dans une chaleur suffocante, le long d’allées très sombres, se suivent des échoppes de vêtements de contrefaçon et d’objets souvenirs. Il suffit de négocier ferme et les soldes sont lancées !

La toquade se poursuit avec le marché ORussey qui, bien que leurs noms se ressemblent, n’a rien de commun avec le précédent. Plus pittoresque, il est surtout fréquenté par les locaux qui viennent y faire leurs courses. On y trouve des ustensiles de cuisine, des jouets, toutes les sortes de riz, des épices, du matériel électronique, etc. Une vraie immersion dans le quotidien des habitants et une belle occasion de capter leur habitudes de vie.

Enfin, l’emblématique marché central, tout récemment rénové, nous impressionne par sa vaste coupole de style art déco sous laquelle se concentrent les bijoutiers et horlogers. Dans les allées en croix, les échoppes de vêtements se succèdent et, tout autour, donnant sur la rue, ce sont les fleuristes, les primeurs, les poissonniers. Amélie y fait l’achat d’une montre pour le voyage qu’elle négocie fièrement à 3,5$. Mais l’aiguille n’a toujours pas bougé en sortant du marché vingt minutes plus tard… Retour à la case départ et déception de ne plus trouver le modèle choisi. À ce prix-là, on ne peut pas trop faire la fine bouche !

Du palais royal, nous ne ferons qu’entrevoir la silhouette le long du fleuve. La journée a été longue, nos jambes ne nous tiennent presque plus, et plusieurs personnes croisées en route nous ont laissé entendre que la visite, onéreuse, n’en était pas indispensable. Nous préférons sauter dans un tuk-tuk et rejoindre notre quartier pour un petit dîner dans la rue, au son des klaxons et face aux sourires des locaux.

Informations pratiques

Informations pratiques

Notre guesthouse : Narin Guesthouse (15$/nuit)

Possibilité de réserver via le site de la ville.

Entrée du musée Tuol Sleng : 3$/pers avec audioguide

Entrée des Killing fields : 6$/pers avec audioguide

Prix d’un tuk-tuk en ville pour un court trajet : 2$

pour les Killing fields : 10$ l’aller-retour

pour l’aéroport : 6$

N’oubliez pas de vérifier que la montre fonctionne avant de l’acheter !

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