Sur la route de Mandalay

Le bus de nuit birman, notre première expérience de la first class

Pour faire le trajet Yangon-Mandalay, nous avons opté pour le bus de nuit, annoncé comme beaucoup plus confortable et rapide que le train. Le départ est fixé à 21h30 de la gare routière de Yangon et l’arrivée prévue vers 6h du matin à Mandalay (nous allons bien finir par nous accoutumer aux arrivées matinales !).

Après un trajet plus qu’épique en taxi, nous découvrons l’ampleur du phénomène des bus de nuit en Birmanie et sommes épatés par leur organisation millimétrée. La station de bus est immense et un nombre hallucinant de véhicules sont prêts à partir (les Birmans voyagent essentiellement la nuit pour ne pas perdre de jour de congés). Mais la vraie révélation se produit lorsque nous grimpons à l’intérieur. Pour la première fois de nos vies, nous allons avoir la chance de voyager en ce que doit ressembler la première classe aérienne ! Des sièges couchettes, molletonnés et larges, un écran pour regarder des films, une couverture mise à disposition, une distribution d’en-cas, de boissons et de brosse à dents (cela va de soi !)… Seul bémol, la climatisation poussée à son maximum. On nous avait prévenus, on est parés.

Indéniablement, ce seront nos 40 000 kyats les mieux investis (soit un luxe à 14 € par personne) ! La route défile pendant que nous roupillons et nous regrettons même de devoir descendre du bus à l’arrivée. Nous aurions bien poursuivi cette nuit sur la route pour quelques heures de plus…

Mandalay Hill

Si Yangon fait office d’exception en Birmanie avec l’interdiction des deux roues dans la ville, une foultitude de scooters zigzaguent dans les grandes avenues quadrillées de Mandalay. Ambiance typiquement asiatique.

Ville très étendue, Mandalay se caractérise par deux grands points d’intérêt : une immense forteresse en son centre qui abrite l’ancien palais royal (aujourd’hui encore d’accès restreint pour les étrangers) et sa colline qui la domine au nord. C’est vers là que nous nous dirigeons le premier jour.

Une fois déposés au pied des escaliers par un jeune chauffeur de taxi qui a sympathisé bien à propos avec Julien, il ne nous reste plus qu’à gravir 663 marches pieds nus (Julien aime toujours autant compter) pour en atteindre le sommet. Nous y arrivons juste avant la tombée de la nuit. La vue est vaste et l’endroit d’une sérénité absolue. Comme partout jusque-là, nous ne croisons que très peu de touristes et avons le privilège de profiter de ce cadre exceptionnel quasiment seuls.

Au bas de la colline, plusieurs pagodes sont rassemblées. Malgré l’obscurité déjà bien installée, nous allons y jeter un œil (l’apéro attendra !)… Rassurez-vous, nous ne resterons pas pour longtemps dans le noir, bientôt percé par une luminosité pour le moins colorée. Il s’avère que les Birmans ont une passion inconditionnelle pour les guirlandes lumineuses. Ils en mettent partout ! Et face à ces pagodes entièrement illuminées, nous nous croyons presque dans un parc d’attractions… de retour à Disneyland Paris !

De l’autre côté de la rue, une entrée peu éclairée nous réserve d’autres surprises. Nous nous avançons, seuls et trouillards (!), au milieu d’une rangée sans fin de petites pagodes blanches tout juste éclairées. Sur ce fond de nuit obscure, l’effet est saisissant. Nous nous avançons encore, jusqu’à la grande pagode dorée qui s’élève au bout du chemin, magnifique dans la lumière qui y reflète nos deux silhouettes. Clap de fin.

Les trois cités royales

Pour éviter les tours organisés que vendent les hôtels et les agences, nous faisons appel au nouveau meilleur ami de Julien pour nous servir de guide et conducteur pendant une journée de visite des trois anciennes cités royales qui entourent Mandalay : Amarapura, Sagaing et Inwa (tarif convenu entre chauffeurs à 30 000 kyats la journée – soit 22 € – contre 35 000 dans les hôtels). Et si tout le monde se rend sur le célèbre pont U Bein pour y assister au coucher du soleil, c’est au contraire par là que nous commencerons notre journée. Réveil à 5h pour avoir une chance de voir le jour se lever sur cette interminable passerelle en teck. Un réveil qui en valait largement la peine !

La nuit qui s’éclaircit, les couleurs qui changent, la nature qui s’éveille, les oiseaux qui pépient, les pêcheurs sur leurs barques, et enfin le soleil qui se lève… Voilà encore un moment magique ! (On se répète un peu…) Nous avons mitraillé avec ce qui nous tient lieu d’appareil photo (le nôtre a décidé de rester à notre première escale à Doha, sans doute attiré par les richesses qataries), puis nous avons rangé le petit matériel pour tout simplement profiter… et regarder passer les villageois et les moines, seules personnes que nous aurons croisées ce matin-là.

Puisqu’il faut bien faire un choix pour le site, nous avons sélectionné quelques images de ce jour naissant sur un pont du bout du monde :

Nous poursuivons notre chemin jusqu’à Sagaing, ville très religieuse qui abrite le plus grand nombre de moines et de nonnes en Birmanie. Sa colline étendue est couverte de pagodes, de tous côtés. Nous montons jusqu’à son sommet pour admirer le point de vue.

Vers 10h, notre chauffeur nous presse pour nous conduire au monastère d’Amarapura où les moines se regroupent en milieu de matinée pour prendre leur repas ensemble. Nous arrivons sur les lieux envahis par une horde de touristes, appareil en main, avancés à leur maximum dans la salle à manger pour prendre les moines en photos… L’impression d’être au zoo nous fait honte. A éviter absolument. Nous repartons illico. Notre guide nous emmène découvrir un temple d’Amarapura dont nous ne connaîtrons sans doute jamais le nom mais qui restera pour nous deux l’un de ceux qui nous aura le plus marqué, après la paya Shwedagon de Yangon bien sûr. L’endroit est désert, l’entrée fait grise mine… Mais, une fois à l’intérieur, c’est sans commune mesure avec tout ce que nous avons vu jusque-là. Nous sommes entourés par des centaines de représentations de Bouddha, installées de façon géométrique, donnant une impression d’infinité. Où qu’on se trouve dans le temple, le spectacle reste identique. Nous n’y sommes que tous les deux, entourés par tous ces Bouddhas, dans un silence quasi religieux, avec pour seul bruit les oiseaux qui chantent. La sérénité et la beauté de ce lieu rien que pour nous… voilà bien ce que nous partions découvrir pendant ce voyage.

La visite se poursuit vers Inwa, la dernière et plus ancienne cité royale des environs de Mandalay. Nous mangeons un morceau pendant que notre chauffeur joue aux cartes avec ses acolytes, puis traversons la rivière jusqu’au village où nous sommes accueillis par une flopée de calèches, en position de départ. Aucun moyen de se soustraire à cette organisation bien huilée. Pour visiter les temples disséminés dans la campagne environnante, il faut en passer par là : calèche obligatoire et tarif non négociable de 10 000 kyats (soit 7 €). Nous voici donc partis pour deux heures de promenade, au rythme du cliquetis des sabots du cheval et des cahots de la route. Les temples sont véritablement au milieu de rien et la majorité sont délabrés. Associés à la vie alentour (les femmes dans les rizières travaillant avec leurs serpes, les hommes labourant les champs avec leurs bœufs), il s’en dégage un charme désuet, comme si cet endroit était resté figé dans le temps, inchangé depuis des siècles. Dommage que nous soyons obligés de suivre le manège des calèches, nous aurions eu plaisir à découvrir cette ancienne grande cité demeurée très authentique à notre rythme et selon nos envies.

En fin de journée, nous retrouvons notre chauffeur qui, manifestement, a perdu beaucoup d’argent aux cartes mais nous reconduit malgré tout sur la route de Mandalay.

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